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26 septembre 2013

La mafia syndicale

Le livre du journaliste Roger Lenglet et du juge prud'homal Jean-Luc Touly, Syndicats Corruption, dérives, trahisons, dresse un tableau noir des petites et grandes turpitudes syndicales. Des dérives qui n'épargnent aucune organisation, souvent sous le regard complice du patronat. Au risque, avertissent les auteurs, de porter un coup fatal au syndicalisme. Extraits.


CCE d'Air France : une direction bien peu curieuse

Le déficit monstrueux du CCE [comité central d'entreprise] d'Air France offre un exemple ahurissant de la propension des directions à laisser s'aggraver les dérives avant de demander un audit. Les élus de la CFDT qui en ont eu la gestion ont sans doute tenu informé leur syndicat au plus haut niveau à peu près en même temps que la direction de l'entreprise.

Reste que le pouvoir d'intervenir était légalement entre les mains des dirigeants d'Air France, d'autant que la compagnie est complètement privatisée depuis 2003, ce qui est censé décupler sa vigilance pour ne pas déplaire aux actionnaires... Elle a pourtant laissé son CCE accumuler des pertes de l'ordre de 21 à 24 millions d'euros. Un "chiffre abyssal", pour reprendre l'expression des confédérations elles-mêmes. Soit 15 millions d'euros pour la période 2005-2008. L'année 2009, le CCE poursuivait sur sa lancée en affichant 13 millions d'euros de pertes.

Des fuites trahissant les batailles syndicales pour s'emparer des mannes du comité, puis un audit réalisé par le cabinet INA et rendu en janvier 2010, ont révélé que cette dégringolade cachait des "dépenses à vocation personnelle" de ses dirigeants, comme des paiements de loyers, le maintien du salaire de deux personnes ayant quitté le CCE, des "locations de voitures sans lien avec l'activité professionnelle", des contraventions, une prime de 44 294 euros pour un membre du CCE, un "séminaire" de quatre jours à Lisbonne pour 25 personnes au prix de 15 775 euros, des dizaines de milliers d'euros de "remboursements de frais" non justifiés... Et ce ne sont là que quelques exemples.

Des versements exorbitants de la direction d'Air France sont aussi remontés à la surface. Il est apparu notamment que, outre la subvention annuelle de 35 millions d'euros que la compagnie verse chaque année au CCE, elle avait mis un compte courant à sa disposition pour lui épargner de faire des chèques en bois "lors des périodes difficiles". Le compte a été fermé la veille de l'audit, fin 2008, débiteur de 7,5 millions d'euros.

Drôles de détachements à La Nouvelle Vie ouvrière

L'intérêt que présente La Vie ouvrière [le journal de la CGT] pour ses lecteurs est incontestable. Ses articles sont le plus souvent pratiques et destinés à fournir au public une culture syndicale permettant de mieux défendre ses droits. Mais ce contenu semble être à l'opposé du fonctionnement de l'équipe rédactionnelle et de l'administration du groupe qui régnait encore il y a quelques années. Parler de gabegie à ce propos ne serait rien au regard des us et coutumes de la maison...

Un journaliste juridique, Hédy Sellami, qui a milité en tant que secrétaire de section syndicale aux PTT, puis travaillé pendant neuf ans au sein de La Vie ouvrière, expose clairement la situation, documents à l'appui : "Les enveloppes étaient monnaie courante à La VO. Rien que dans mon propre service, il y avait plusieurs détachés de la Sécurité sociale qui en profitaient. Pour résumer, ils ne faisaient pas grand-chose tout en percevant deux "salaires".

"Il cite, à titre d'exemple, une personne absente des locaux - où elle était pourtant supposée travailler -, qui percevait depuis une vingtaine d'années son salaire de la Sécu, plus une rémunération de La VO, en liquide. "Ces versements au noir se faisaient directement de la main à la main. Ces personnes venaient chercher leurs enveloppes tous les mois sur place, certaines se plaignant même de ne pas recevoir assez."

Nous trouvons le cas, parmi d'autres, d'une employée détachée par la Sécurité sociale, toujours payée par celle-ci, qui venait prendre en plus ses 500 euros au noir, tout comme son mari, lui aussi "détaché" de la Sécurité sociale, bénéficiant du même système. "Le couple profite en outre de primes et d'un treizième mois, sans oublier une voiture payée, la prise en charge de l'essence, de l'assurance, des réparations, etc." Ils vivent tous deux en province, à 300 kilomètres de Paris, et vaquent à d'autres occupations...

En calculant ce qu'ont coûté à La VO ces versements indus pendant vingt ans, Hédy Sellami a fait apparaître que, à lui seul, le couple bénéficiaire de ce régime parfaitement illégal avait absorbé près du quart du déficit annuel invoqué par le magazine pour procéder à des licenciements prétendument "économiques".

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