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20 avril 2015

Camp des saints, on nous y prépare

Vingt-quatre heures après le drame de trop, l'Europe se retrouve en catastrophe devant l'alternative qu'elle a longtemps refusée. Sauver beaucoup plus de migrants en Méditerranée, c'est-à-dire accepter des dizaines, voire des centaines de milliers, de réfugiés de plus sur son sol. Ou sacrifier ses idéaux et son image de «puissance bienveillante», en laissant d'autres rafiots surchargés s'enfoncer dans les eaux bleues, au sud de la Sicile.

L'alarme a sonné dimanche, la mobilisation est générale dans l'UE. Les ministres des Affaires étrangères se sont retrouvés ce lundi matin à Luxembourg, suivis dans l'après-midi d'une convocation extraordinaire des ministres de l'Intérieur. Dans la foulée, la tenue d'un sommet européen ce jeudi a été annoncée avec les vingt-huit chefs d'État et de gouvernement.

Un renforcement d'urgence des moyens civils et militaires de sauvetage, près des côtes libyennes parait désormais inévitable, d'après les diplomates. Ce serait faire renaître, sous égide européenne cette fois, l'opération de secours Mare Nostrum à laquelle l'Italie avait dû renoncer l'automne dernier faute de moyens financiers et de soutien dans l'UE: une recherche systématique des rafiots et autres «bateaux de la mort» qui se lancent dans la traversée, des côtes de l'Égypte à celles de la Tunisie.

Il s'agit bien d'une opération de sauvetage à grande échelle, d'une mission qui n'a rien à voir avec la surveillance des frontières maritimes de l'UE confiée, dans les parages de la Sicile, à l'agence européenne Frontex. «Cette fois, les États eux-mêmes vont devoir se mouiller», lâche un ambassadeur citant d'énormes besoins en patrouilleurs, hélicoptères, avions de surveillance maritime et autres navires-hôpitaux.

Confrontées à l'extrême urgence humanitaire, les capitales de l'UE vont aussi devoir rempocher l'argument qu'elles avaient utilisé l'an dernier pour torpiller l'opération militaro-humanitaire italienne: assurer les migrants d'un sauvetage comme l'impose le droit de la mer, ce serait multiplier les vocations de demandeurs d'asile et faire le jeu des trafiquants en Libye. C'est vrai. Mare Nostrum a sauvé 170.000 migrants l'an dernier, aussitôt débarqués en Italie pour alourdir les chiffres 2014 de l'immigration irrégulière dans l'UE.

Une opération européenne aurait probablement le même effet d'appel d'air. Fabrice Leggeri, le patron de Frontex, indique au Figaro que «plusieurs centaines de milliers» de candidats à la traversée attendent leur heure en Libye, même si une pénurie de bateaux tempère encore l'exode, en dépit des apparences. Sur fond de chômage et de xénophobie, la question est sensible, notamment en France. Mais l'effrayant bilan des derniers jours conduit aux révisions.

Seul un partage équitable du «fardeau» des migrants entre les 28 États peut faire passer cette pilule politique empoisonnée. Ce sera sans doute l'enjeu d'un sommet européen, s'il a lieu.

L'Italie, en première ligne, le réclame depuis des années. L'Allemagne, première destination finale des migrants, souhaite officiellement une «clef de répartition européenne». La France, par la voix du secrétaire d'État Harlem Désir, a demandé dimanche que les rescapés de la Méditerranée soient désormais «accueillis dans l'ensemble des pays de l'UE», notamment à l'Est. La discussion avance, le marchandage va bientôt commencer.


Et pourtant ... Relire: comment l'Australie a géré (et résolu) ce même type de problème

 

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